Créer Prince of Persia


Au début, Prince of Persia était un jeu s'inspirant du cinéma, des duels à l'épée de Robin des Bois (1938) jusqu'au moment où Indiana Jones saute par-dessus des pieux dans Les Aventuriers de l'arche perdue (1981). C'est donc un juste retour des choses que, vingt ans plus tard, le prince pixellisé de l'Apple II s'élance à son tour vers le grand écran.

Walt Disney Pictures et Jerry Bruckheimer, qui venaient de sortir Pirates des Caraïbes, ont acheté le pitch suite au succès du reboot de 2003 édité par Ubisoft. J'ai écrit le premier scénario (PDF, anglais), puis j'ai vu le projet évoluer et devenir une énorme production, un blockbuster estival qui a emmené son casting et son équipe de plusieurs milliers de personnes dans le désert marocain.

Mon moi enfant a vu une forme de poésie dans le fait d'attribuer à Alfred Molina (qui n'avait pas réussi à sauter les pieux dix minutes après le début de l'Arche perdue) dans le rôle de Sheikh Amar.

Le film de Disney sorti en mai 2010 s'est accompagné d'une foule de livres, jouets et autres produits dérivés Prince of Persia, parmi lesquels peut-être le plus incroyable : du LEGO Prince of Persia. J'ai écrit une préquelle sous forme d'anthologie de bande dessinée, Prince of Persia : Avant la tempête de sable, en collaboration avec des artistes comme Tommy Lee Edwards, Bernard Chang, Cameron Stewart et Niko Henrichon. Le seul produit manquant à l'appel (de façon ironique), c'était un jeu vidéo ; la franchise Ubisoft est restée indépendante du film.

Je travaille l'écriture cinématographique depuis l'université ; quand mon premier scénario a été acheté en 1987, j'ai failli ne pas finir le développement de Prince of Persia. (Je raconte cette histoire dans mes carnets des années 80). Jamais je n'aurais deviné que mon travail sur Apple II m'amènerait, 20 ans plus tard, à voir un de mes scénarios produit pour la première fois : Prince of Persia : Les Sables du temps. Avec des recettes au box-office mondial de 335 millions de dollars, Prince of Persia a été la plus rentable des adaptations de jeu vidéo au cinéma jusqu'à ce que Warcraft ne la détrône en 2016.


Transmédia : du jeu au film à la BD

Au fil des nombreuses aventures du prince, les sables du temps m'ont amené du jeu vidéo au scénario, mais ils m'ont aussi fait retrouver mes racines via un medium narratif et visuel que j'ai toujours adoré : la bande dessinée.

En 2004, j'ai reçu un e-mail de Mark Siegel, éditeur d'une nouvelle collection chez Macmillan nommée First Second Books. Il m'a dit que Prince of Persia occupait une place spéciale dans son cœur depuis le début des années 90, quand il y avait joué en noir et blanc sur un Macintosh Classic. Serais-je intéressé par l'idée d'en faire un livre ?

J'étais alors occupé à écrire le scénario du film Prince of Persia. Plutôt que d'à nouveau adapter un des deux premiers POP ou Les Sables du temps, je lui ai donc proposé d'inviter un auteur perse pour avoir un regard neuf sur les anciens mythes et légendes dont s'étaient inspirés les jeux et le film. Il en a résulté une bande dessinée one shot du poète iranien A. B. Sina, illustrée par les fantastiques illustrateurs LeUyen Pham et Alex Puvilland (j'en signe la postface). Celle-ci m'a donné l'inspiration pour me lancer dans mon œuvre suivante : Templiers, qui n'était ni un film ni une série télé, mais une bande dessinée créée avec LeUyen et Alex.

Leurs illustrations brillantes d'inventivité ainsi que quatre années d'immersion historique approfondie ont donné vie au monde de Templiers : un 14e siècle fait de chevaliers, d'aventures, d'idylles et de manigances. Dès que j'ai eu en main notre splendide histoire épique, 480 pages en couleur à couverture rigide, j'étais accro. Ce que j'avais à une époque vu comme un complément de ma carrière principale dans le jeu vidéo et le scénario m'apparaissait sous un jour nouveau. C'était là un medium artistique aussi versatile et puissant que les films, séries ou jeux vidéo. Il m'offrait une grande liberté créative et ne m'obligeait pas à convaincre des studios de débloquer des budgets de plusieurs millions de dollars.

Dans la même période 2005-2012, j'ai écrit de nombreux scénarios, parmi lesquels : pour Fox Studios et avec John August, le pilote d'une série télé sur une société militaire privée ; pour l'actrice Megan Fox (aucun lien), une adaptation en long métrage de Fathom, le comics de Michael Turner ; et pour Paul Verhoeven, une adaptation de mon propre jeu, The Last Express. Ces trois expériences sont chères à mon cœur, d'autant plus que (pour les standards hollywoodiens), elles ne sont pas passées loin de finir à l'écran. Templiers m'a rappelé que, tout comme j'avais créé Karateka et Prince of Persia sur un Apple II dans les années 80, la bande dessinée était un medium qui me permettait de créer sans demander la permission de qui que ce soit.

Si vous avez apprécié l'histoire de Prince of Persia ou de The Last Express, j'espère que vous lirez Templiers ainsi que mes deux dernières trilogies de bandes dessinées : une adaptation moderne de Monte-Cristo (avec Mario Alberti), et une aventure historique prenant place au 18e siècle, Liberté ! (avec Étienne Le Roux). Ces deux dernières sont disponibles en français en volumes individuels, et les éditions anglaises intégrales paraîtront une fois les trilogies achevées.


Replay

La case ci-dessus montre un moment saisi sur le plateau marocain du film Prince of Persia : Les Sables du temps ; elle est tirée de ma nouvelle bande dessinée autobiographique, Replay : Mémoires d'une famille. Si le film Prince of Persia est venu fermer une boucle temporelle de 20 ans, Replay en clôt une encore plus longue : c'est la première bande dessinée que j'ai illustrée et écrite.

C'est donc moi, sur le plateau du film Prince of Persia en 2008, occupé à dessiner d'après nature dans mon carnet Moleskine. Comme je l'explique sur la page Tirages d'art, mon journal d'artiste a commencé comme un exercice quotidien avant de devenir bien plus.

Après quinze ans et quarante carnets, plus l'équivalent d'un masterclass en narration de bande dessinée dispensé par les artistes avec lesquels j'ai collaboré, je me suis senti prêt à me lancer dans le projet le plus personnel et le plus ambitieux que j'avais entrepris à ce jour. C'était Replay, une bande dessinée autobiographique de 320 pages entremêlant des épisodes de ma carrière dans le jeu vidéo et le scénario avec trois générations de mon histoire familiale.

Replay : Mémoires d'une famille est publiée par Delcourt en français et First Second Books en anglais.

D'autres documents d'archives sur les coulisses du film Prince of Persia sont disponibles dans la Bibliothèque.

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