1er janvier 1995

Pris le thé avec Lisa et Ginny à Brooklyn. Lisa était bien plus en forme qu’à Noël. Elle a du mal à se situer dans le temps et dans l’espace, mais tout ce qu’elle dit est ancré dans le réel ; il suffit d’un petit effort d’interprétation pour en comprendre le sens. Comme les conversations qu’on a dans ses rêves, dont le sens véritable échappe souvent à la logique immédiate.

5 janvier 1995

Trois jours que je suis de retour au travail, et waouh, toujours debout.

Je suis rentré tard lundi soir, heureux de revoir S.F., j’ai conduit Patrick, Sandrine et Tomi à Fairfax, fait à dîner là-bas et pris un bain chaud sous une pluie légère. Ah, la Californie !

Mardi a été le premier jour de reprise. J’ai rapidement retrouvé mes marques. Brian a téléphoné pour me rappeler que j’avais été nominé pour les Eddy catégorie MacUser. On a assisté à la cérémonie mais on est rentré les mains vides.

J’ai montré le jeu à Denis Friedman et à John Evershed.

L’ambiance au bureau est fébrile. On avance lentement, mais sûrement.

7 janvier 1995

Hier (vendredi), Elia Cmiral est venu au bureau et y a passé toute la journée. Je l’apprécie. Je crois qu’il fera ça très bien. Le problème, comme souvent, est de savoir comment lui fournir l’information dont il a besoin pour travailler.

J’ai passé toute la journée d’aujourd’hui à plancher sur de nouvelles versions du script et des tableaux de références croisées entre le script et les scènes cinématiques, dans le but de faire comprendre – pas seulement à Elia mais aussi au designer sonore, à Nicki, Terry et à tout le monde – comment les scènes cinématiques s’intègrent dans l’histoire et dans le jeu dans sa globalité. Il était temps ! Il y avait trop d’infos que je n’avais jamais pris le temps de sortir de ma tête.

« Tu n’as rien de mieux à faire que de passer ton samedi ici ? » a demandé Terry.

J’ai répondu : « non. »

8 janvier 1995

Dîner avec Mark Netter et Elia et sa femme chez Mifune. On se récompense la nuit du dur labeur du jour.

Sur la route ou chez moi, je passe mon temps libre à écouter des morceaux réunissant piano et violon pour la scène du concert. J’aime particulièrement la sonate de Franck (en la majeur), mais celle de Brahms en ré mineur me plaît énormément aussi.

9 janvier 1995

Dîner avec Robert chez Greens après la salle. On a bu une bouteille de vin et joué au billard. Il est sur un petit nuage depuis qu’il est amoureux et il y remontait sitôt que j’arrivais à l’en faire descendre. Quant à moi, je me dévoue corps et âme à ce projet éléphantesque, qui ne laisse de place dans ma vie pour rien ni personne d’autre.

15 janvier 1995

J’ai rencontré Linda Fiorentino à la salle de sport. Elle est en ville pour tourner Jade.

Les négociations avec Broderbund (Tom) marquent le pas.

Je suis fauché.

16 janvier 1995

Ce projet est GARGANTUESQUE.

17 janvier 1995

Elia m’a fait une offre à 30.000 dollars, ce qui correspond exactement à ce que nous espérions. Nous avons donc notre compositeur !

Ce projet est gargantuesque. Je ne l’ai pas déjà dit, ça ? Ce sera un miracle s’il ne coûte que 2 millions de tickets.

18 janvier 1995

J’ai coincé Netter et Robert et je les ai forcés à me regarder créer un tableau de budget et de recettes et dépenses en Excel. De nous trois, qui eût cru que ce serait moi, le businessman ! On est vite redescendu sur terre : même avec les 600.000 dollars de Broderbund, on aura besoin d’argent frais dans peu de temps – avril au plus tard. Le coût total avoisinera les 2,2 millions de dollars pour la version PC (à supposer qu’on la livre en septembre) ; si on prolonge la location du bureau jusqu’à la fin de l’année, ça fera 250.000 dollars de plus. Aucune chance de récupérer un centime de mon million de dollars avant 1996.

Je ne crois pas que je referai ça un jour. Une fois, ça suffit.

Je me sens dépassé par tout ça.

La vie ne s’arrête pas à ce projet. Il faut que m’en souvienne. Même si je dois y perdre mon million, la vie continuera. Je pourrai toujours écrire, je pourrai toujours vivre, aimer et vivre d’autres aventures… et il y a six ans, c’était là tout ce que je désirais. Ce serait trop bête de laisser le stress m’ôter toute joie de vivre.

Un nouvel extrait des carnets de Jordan « Il y a 30 ans cette semaine » sera publié ici mercredi prochain. Merci de votre visite !

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